Page:Rodenbach - Les Vies encloses, 1896.djvu/231

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Prolongement sans fin de cette vie occulte :
Tout un pavoisement, toute une panoplie ;
Une espérance un peu vague qui se déplie ;
Un souvenir ouvrant sa fleur dans l’herbe inculte.

Puis des fièvres roulant leurs vagues de phosphore,
Comme si tout le clair de lune était en nous.
Quels sont ces péchés noirs que moi-même j’ignore
Et qui hantent mon âme avec de grands remous ?

Sombre trésor intérieur de mes pensées ;
Royaume souterrain auquel enfin j’accède ;
Et cette mer du fond de l’âme, immense et tiède,
Où sont des cris et des tendresses renoncées.

Ah ! ce que l’âme sait d’elle-même est si peu
Devant l’immensité de sa vie inconnue,
Sans même le soupçon d’être un abîme bleu
Au fond duquel sa Destinée est seule et nue !