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IX

ADIEU


I



AINSI donc c’est fini ! mon beau rêve est défunt,
Celui de vous aimer comme une amante unique,
De sentir sur mon front vos mains de Véronique
S’appuyer comme un voile imprégné de parfum.

Il faut continuer, sans l’appui d’une femme,
À gravir mon Calvaire élégiaquement,
Et les hommes mauvais vont rire à mon tourment
Moi qui porte pour croix le fardeau de mon Âme.

Depuis longtemps déjà par vous j’avais souffert,
Au miroir de vos yeux se mirait ma tristesse ;
Mais pour vous abriter, l’arbre de ma Jeunesse
Redevenait vivace et redevenait vert.

J’aurais tant désiré dans un creux de vallée
Dans un grand paysage emporter notre amour,
Causer d’éternité dans la douceur du jour
Et revenir, — pensifs de la joie en allée !…