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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

musique était dépourvue d’invention. Il venait d’être question de confier à une régie l’Académie royale de Musique, qui était sous la surveillance de la ville de Paris ; le chevalier, quelque temps avant ce voyage de Londres, fut mis à la tête d’une compagnie de capitalistes qui se présentèrent. Ce fut alors que Mlles Arnoult, Guimard, Rosalie Levasseur et autres actrices de l’Opéra adressèrent un placet à la reine pour représenter à sa majesté que leur honneur et leurs priviléges ne leur permettaient pas d’être soumises à la direction d’un mulâtre. Les propositions de Saint-Georges avaient donc été repoussées[1].

Pendant son absence, la calomnie ne l’avait pas épargné ; il en glana bientôt les fruits amers à chaque pas qu’il fit dans les cercles qui l’avaient tant admiré. Jaloux à l’excès de ses triomphes, désirant se venger de lui et ne plus avoir sous les yeux le spectacle de ses succès, plusieurs de ses rivaux s’étaient réunis, résolus de faire payer au chevalier les maîtresses qu’il

  1. L’auteur de l’article sur Saint-Georges, tome 39e de la Biographie universelle, remarque qu’il ne serait pas impossible qu’une pareille disgrâce eût rendu celui qui en était l’objet plus accessible aux opinions révolutionnaires, qui au reste devinrent celles de tous les hommes de couleur. Nous pouvons affirmer, nous qui avons lu plusieurs lettres de Saint-Georges, que son seul instigateur vers les idées révolutionnaires fut le duc d’Orléans Philippe-Égalité ; il suffira de lire le chapitre intitulé le Chiffre de la reine pour s’en convaincre ; il n’est que la traduction affaiblie d’une curieuse lettre de Saint-Georges adressée à Mme D***, lettre que nous avons lue, mais qu’on ne nous a pas permis de livrer à la publicité des pour motifs de famille. (Note de la 2e édition.)