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ÉPILOGUE.

cette ville, c’est un château fort dans lequel plusieurs colons se sont retranchés ; mais, pour la plupart, ce sont de pâles vieillards tremblant pour leurs femmes et pour leurs filles ; ils ne sauraient lutter contre un plan d’attaque bien établi. Je sais, à n’en pas douter, que plusieurs d’entre eux ont des trésors, des diamans qu’ils veulent aller de là enfouir au Morne-Rouge. C’est à nous, braves noirs, à nous emparer de l’or de ces despotes, qui ont assez longtemps fatigué le pays de leurs vexations et de leurs usures. Ne vous souvenez-vous plus que l’Espagne et la France ont obtenu dans le temps qu’on comblât les mines de l’île, et souffrirez-vous que ces hommes jettent au Morne-Rouge de tels trésors ? Non, mille fois non, et pendant que la nuit s’étend sur la ville faisons prisonnier Blanchelande, puisque cette nuit le gouverneur Blanchelande couche à Saint-Marc !

À ce discours, auquel la pantomime emphatique de l’orateur donnait un irrésistible ascendant, tous les noirs levèrent leurs sabres, et jaloux de conquérir quelques-unes de ces vaines décorations dont les affublaient les Espagnols, ils ne tardèrent pas à prendre le chemin de la ville.

Quand ils arrivèrent, ils avaient éteint leurs torches ; mais la vedette du fort les aperçut, et elle tira un coup de fusil.

Ce fut le signal de la lutte : les dragons et les noirs en vinrent aux mains. La prison de Saint-Marc se vit en un instant cernée et incendiée ; les malheureux qui en sortaient, échappés aux flammes, qui noircissaient tout autour d’elles, étaient sur-le-champ