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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

qu’elle avait de plus divin dans sa personne, c’était certainement la bouche, qui décrivait à la lettre et en miniature l’arc de l’amour. La blancheur de son teint prêtait un charme réel à cette bouche ornée d’un sourire exquis et meublée de dents charmantes. Ses bras étaient délicieusement veinés, on y voyait circuler le sang ; l’odeur de sa peau égalait celle d’un parfum. Sous les tresses de poudre qui se déroulaient à son cou et couraient à ses épaules, un peintre eût cru découvrir une tête de Mignard, tant la pureté des lignes dépassait les formes coquettes des autres têtes de l’époque. En un mot, elle était régulièrement belle, d’une beauté inattaquable même à l’œil d’une rivale.

Aussi en la voyant rien que sur son pastel, envoyé du fond de la Bretagne à Mme de Montesson, le duc d’Orléans lui avait dit :

— Marquise ! vous avez là un morceau de roi dans votre famille !

Mme de Montesson est la dame des belles cousines, avait ajouté prétentieusement M. de Carmentel en lui rendant le portrait.

À dater de ce jour, le parti de rigueur à prendre vis-à-vis Mlle Agathe de La Haye, qui venait, à la suite de la mort de sa mère, implorer la tutelle de sa cousine, avait été celui du bannissement.

Agathe gémit d’abord en se voyant renfermée si étroitement dans cette prison dont le vieux Glaiseau venait d’être institué le geôlier, à titre de serviteur de Mme de Montesson. Elle regretta ses belles prairies de Bretagne, son port rempli de marins, ses amies,