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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

sur son visage, Mme de Langey n’avait jamais été plus belle.

Elle parut à ce souper en simple robe noire.

Comme toutes les veuves, Mme de Langey n’avait rien eu de plus hâté que de se conformer à l’étiquette de son deuil, mais aussi mieux que personne au monde elle savait le temps précis qu’il est décent pour une femme de s’affliger. Le jour où la marquise pourrait mettre les diamans après les pierres noires était bien loin encore, mais elle se servait si habilement de tout l’encadrement obligé de sa tristesse qu’il semblait que les diamans n’eussent pu relever en rien l’éclat naturel de sa figure.

Son deuil était d’un an et six semaines, et la cour, où M. le contrôleur général avait tant de fois promis à la belle créole de la produire, lui imposait comme règle absolue six mois de veuvage avant qu’elle pût l’aborder.

Mme de Langey trouva son monde réuni dans la grande galerie boisée de cèdre, au sein de laquelle on avait servi le souper. Une demi-douzaine de négrillons en livrée bourdonnaient autour de la table, où s’élevaient en piles les ananas, les cédrats et les pastèques.