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Page:Roger de Beauvoir - Le Chevalier de Saint-Georges V1, 1840.djvu/246

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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

m’en remettant au hasard du soin de me faire trouver M. de Langey, et voilà qu’une semaine d’absence avait suffi pour me dépouiller à mon insu ! Un ordre de la cour d’Espagne, dicté par la plus indigne fiscalité, signifiait au président de San-Domingo de faire sur-le-champ combler toutes les mines de l’île ; il interdisait d’ouvrir des rameaux le long des rivières, d’exploiter les veines du sol, d’en vendre les produits aux Anglais. Les milices de San-Yago et du fort Saint-Jérôme étaient chargées de l’exécution de cette loi, qui mettait le sceau à ma ruine ! Vainement les propriétaires avaient-ils réclamé contre ces iniques prétentions ; vainement les juifs (et San-Domingo en contient un grand nombre) avaient-ils offert eux-mêmes des subsides au président ; l’état déplorable de la colonie espagnole, connu déjà du conseil de Madrid, sans qu’il y eût porté remède, n’était même plus un argument à faire valoir. Comme une caravelle que le canon ennemi coule au fond de l’eau, ma cargaison d’or s’abîmait ; la baie de Samana, celle de Yaqui et du Macabon, frappées elles-mêmes de cet interdit royal, m’apparurent bientôt protégées par le pavillon jaune de l’Espagne, que je fus tenté d’arracher de mes deux mains…

« Ruiné, ruiné par ma propre patrie ! m’écriai-je. Car ce ne sont pas des noirs qui m’ont cette fois volé, c’est une commission souveraine, un ordre du roi qui veut se réserver la Castille d’or ! Nos ministres ne trouvent plus indispensable de passer la mer pour profiter des richesses de la partie espagnole ! Ce n’était pas assez des départemens que la cour