voir être suprême possède seul cette force amère et sombre.
— Vous n’irez pas aux Cayes, vous me le promettez ? dit-elle.
Le carillon flamand de l’habitation sonna trois heures : c’était le goûter de Maurice ; la mulâtresse descendit.
— Mon bon ange est parti, pensa tristement Saint-Georges en la regardant s’éloigner ; pourquoi n’est-ce pas Finette que j’aime ?
— Je n’irai point aux Cayes ! reprit-il résolument en se levant après son départ.
Il fit un paquet de quelques hardes qu’il mit au bout d’un bâton, sortit de cette chambre, qui était une chambre des communs, et se réfugia sous des palétuviers assez distans de l’écurie. La nuit tardait au gré de son désir impatient ; il observa tout de cette cachette, les fourgons attelés, les noirs réunis, les bêtes à cornes qui devaient les suivre. Il espérait sans doute n’être point vu, cette fois ce fut Noëmi qui le trahit. Devinant sa résolution, elle l’en gronda ; ne seraient-ils pas tous les deux réunis dans ce voyage ? La négresse, on le pressent, ne l’interrogea pas sur Mme de Langey… Elle lui représenta seulement sa mauvaise fortune dans cette demeure funeste, les douleurs et les supplices qui l’y attendaient. Le sifflet des nègres commandeurs appelait en ce moment les esclaves de départ. Saint-Georges monta dans l’une de ces charrettes sans savoir ce qu’il faisait, on l’y entassa près de sa mère. Les chevaux partirent au grand trot, la nuit était noire, et l’on