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Page:Roger de Beauvoir - Le Chevalier de Saint-Georges V1, 1840.djvu/368

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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

c’était le point d’intersection de la partie française et de la partie espagnole. Plusieurs sentiers divergens se croisaient dans la prairie ; des lataniers, des acacias, des sapotilliers, renfermés dans une multitude d’enclos, envoyaient de toutes parts leurs odorantes senteurs à la route. Tio-Blas avait ordonné à ses gens de se tenir prêts ; chaque œil était au chemin, chaque main à la gâchette du fusil. Pour être avertis à temps de quelque bonne arrivée, un Espagnol de la troupe qui, par un singulier raffinement de coquetterie, avait laissé croître à volonté l’ongle du pouce de la main droite, afin de tirer de plus beaux sons de sa guitare, venait d’être envoyé près des cannes de la route, quand tout d’un coup il revint à toutes jambes en s’écriant : « Les dragons ! la cocarde blanche ! »

Le jour tombant permettait en effet de discerner au loin ces uniformes… Ils formaient un piquet de cavaliers assez fourni autour d’une berline découverte…

Cette voiture allait alors au trot le plus rapide ; elle était menée par de petits postillons nègres. Au fond de la berline, Tio-Blas entrevit auprès d’une dame dont le voile était rabattu, un homme décoré du plastron de l’ordre de Malte, espèce de cuirasse de satin noir qui lui couvrait le ventre et la poitrine : cette cuirasse était marquée d’une immense croix de Malte en toile d’argent. L’Espagnol n’avait jamais vu ce personnage ; mais il se retourna au cri que poussa Saint-Georges, qui avait reconnu Mme de Langey.

— C’est bien elle, pensa Tio-Blas ; l’avis que j’avais reçu de cette promenade était sûr !