Aller au contenu

Page:Roger de Beauvoir - Le Chevalier de Saint-Georges V1, 1840.djvu/369

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
161
LE PORTEFEUILLE

Arrivée près de la lisière de ce bois touffu, la berline se mit au pas.

— Ce sera pour Maurice une salutaire promenade, dit la marquise ; je vous remercie pour lui, cher prince, des ressorts de votre berline ; c’est un vrai hamac, n’est-ce pas, Finette ?

La mulâtresse avait les yeux fixés sur la rivière du Cabeuil, que les blocs de rochers noircissaient insensiblement de leurs grandes ombres.

— Voilà un paysage, reprit M. de Rohan, qu’il fait bon d’admirer avec un piquet de dragons du roi. On dit ces limites peu sûres ; ces gueux d’Espagnols se multiplient, je crois, comme des moustiques ; ils volent dans l’air !

— Le prévôt des maréchaussées de Saint-Marc vous a fait, cher prince, une galanterie toute royale… À la seule vue de cette escorte…

— On doit songer au trésor qu’elle protège, n’est-ce pas ? Ce trésor, marquise, vaut tous les diamans de la couronne…

Comme de semblables phrases étaient chose peu commune dans la bouche altière de M. de Rohan, Mme de Langey l’en récompensa par un regard brillant comme la flamme et qui semblait traduire tout son orgueil d’être admirée. Elle avait rabattu sa calèche de soie noire sur ses épaules et balançait à sa main un beau mimosa récemment cueilli…

— Vous tenez, cher prince, à me nier ces bouquets placés, il y a un mois, tous les soirs sous ma moustiquaire… savez-vous que c’est très-mal ? Un grand