s’accroupirent près du feu. Le négrillon tendit la main au vaudou, qui venait de boire deux ou trois gorgées de tafia, et il lui demanda sa bonne aventure sur cette main, tandis qu’il lui présentait dans l’autre une poignée de beaux coquillages.
Pour l’autre enfant, — dont la couleur était celle d’un mulâtre, — il refusa, malgré les instances de Noëmi, la négresse, de présenter sa main au jongleur. Couché auprès de la natte du gérant, qui bourrait pour la troisième fois sa pipe, il s’occupait à graver un nom sur un couïs, gobelet ordinaire des nègres…
Si la différence de couleur demeurait sensible entre ces deux enfans, celle du caractère et de l’organisation paraissait aussi évidente. Le négrillon, pour être moins lourd et moins rustre qu’un de ses aïeux africains, restait tout aussi mal partagé du côté de la grâce et de la tournure. Ses épaules étaient trapues, sa lèvre gloutonne, son front avancé. Superstitieux comme tous les nègres, il affichait surtout une grande vénération pour le suif de France, dont il s’était frotté tout le corps, et de plus un culte ardent pour les fétiches ou gris-gris dont il avait orné l’ajoupa de sa mère négresse. Ce soir-là, Zäo, c’était le nom de ce nègre, avait, contre son habitude, l’œil plus vif et plus brillant, sa pose était emphatique en tendant sa main au vaudou, et tout annonçait un ébranlement intérieur dans sa nature.
— Eh bien ! Zäo, que veux-tu que je fasse de ta main ? répliqua le vieux jongleur en ayant l’air d’in-