un sol fécondé par veines distinctes et divinement choisi, des épiceries et des plantes indigènes.
À cette époque, quelques-uns des plus riches propriétaires de Saint-Domingue, ruinés en partie à la suite de la banqueroute de Law, s’étaient courageusement tournés vers la culture. Du jour où leur fortune s’était évanouie en billets de la Compagnie du Mississipi et que l’établissement dit colonial avait été prononcé, ils avaient senti le besoin de se faire eux-mêmes les exploitateurs de leurs produits, de les défendre et de les garantir contre des calamités qu’ils ne prévoyaient que trop. Le système colonial avait fait abandonner celui des compagnies exclusives, la France entière, pour ainsi dire, s’était faite compagnie à l’égard de sa colonie, elle exerçait envers elle un monopole qui n’était point compensé réellement par la réciprocité. Saint-Domingue, en effet, ne fournissait à la France que des articles dont elle pouvait, à la rigueur, se passer : c’était le sucre, l’indigo, le café ; la France apportait à Saint-Domingue les denrées indispensables à ses besoins : la farine, les bestiaux, les bois. Entre un commerce de luxe et un commerce de première nécessité peut-il exister une réciprocité véritable ? Les plus judicieux ou les plus prévoyans d’entre les colons s’alarmaient donc avec justice de la gêne introduite par le système prohibitif. La rigueur du blocus et la famine de 1745, célèbre autant que celle de 1756, dans les annales de l’île, durent les fortifier, à coup sûr, dans ces idées de découragement.
Par suite du système colonial et de la guerre, le