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CREOLE ET MARQUISE

par enlever à Joseph Platon la badine à glands qu’il portait et par la donner au sapajou, qui la brisa comme une allumette. Cela fait, il tira à les casser les chaînes de montre du gérant, et lui souffla la poudre de son collet dans les yeux. Joseph Platon déclara ces gentillesses adorables ; il félicita Mme de Langey sur la beauté de son fils. Encadrée par de charmans cheveux blonds, la figure de Maurice, frêle et délicate, semblait être, en effet, une miniature de celle de sa mère : elle avait cette même couleur molle et limpide, cette chair blanche qui indiquent plutôt l’opulence que la santé ; les cheveux et les cils de l’enfant, sa bouche ronde et pure, son nez mince, témoignaient assez en faveur d’un enfant de bonne race. La fée Heureuse semblait s’être penchée en souriant sur le berceau de cet enfant, en le dotant de tous les dons du bien-être et du visage.

— Mon fils a six ans, monsieur Platon, reprit la marquise, et, le croiriez-vous ? il n’est point encore baptisé. Des raisons diverses ont retardé cette cérémonie pendant que j’habitais la Guadeloupe. Vous m’obligerez, monsieur Platon, d’en écrire ce soir même à M. le curé de Saint-Marc, qui est, je le crois, votre paroisse. Je connais l’esprit des habitans de l’Artibonite, la promptitude de cette démarche est de conséquence pour moi. Songez-y donc, et rapportez-moi la réponse demain matin. Encore un mot, monsieur Joseph Platon. Je ne vous gênerai en rien, pourvu que vous suiviez toujours mes volontés. Au revoir, monsieur Joseph Platon.

La négresse remporta Maurice, qu’on ne laissait