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SÉPARATIONS


Je me sentais bien seul ; la sœur de ma jeunesse
Venait de s’embarquer pour un pays lointain.
À qui conter ici mes peines, ma détresse,
Et les entraînements de mon cœur incertain ?

Le ciel me sembla gris, quoiqu’il fût d’émeraude,
Et je souffrais du froid d’un bien léger zéphyr,
Zéphyr qu’on bénissait, car sur la brique chaude
Le soleil du midi brûlait, faisait souffrir.

Et tout au fond de moi, je me sentais de glace,
Et la foule des cours, des jardins et du port,
Au lieu de m’égayer par l’esprit de sa race,
Augmentait mon ennui ; je me plaignais à tort.
 
Marseille, sous le dais d’une nuit étoilée,
Me paraissait moqueuse et pleine de dédain
Pour mon isolement ; sa lueur mi-voilée
Semblait me rejeter, me chasser de son sein.