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Page:Roinard - Sur l’avenue sans fin, 1906.djvu/7

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Noires, je rêvais de son cher et rougissant
Sourire et du lent frôlement des mains câlines
Qu’elle ouvrait pour offrir tout en les caressant,
Ses seins veinés de vert, dont les chairs ivoirines
Semblaient avoir dardé leurs dures pointes fines
Dans le sang qui jaillit, en fleurs
Des églantines.
Et ce soir, j’éprouvais d’ineffables douceurs
En voyant, là tout près, un patient lierre
Qui, peu à peu, par ses rampements enlaceurs
S’était haussé hors l’ombre meurtrière
D’un chêne et je songeais qu’en un désir pareil
Elle avait toute femme et toute fière
Poussé le long de moi jusqu’au soleil.



 :Tout à coup,
Brusque piqûre à la chair nue
Et brune du ciel, là-bas, au bout
Des mystères infinis de cette avenue
Et comme du fond de son deuil, voilà que point
Très loin, très loin, presqu’à limite de vue
L’infime point
D’or d’une étincelle si ténue
Qu’elle évoque un vol de luciole perdue
En l’étendue
Opaque d’une orageuse nue.
Avec elle ou jailli d’elle, voilà que point
En très subtile vibrance à peine entendue
L’infime frisson d’ombre d’un point
Sourd et dont la démence bruit plus menue
Qu’au loin
L’aile battante du frêle insecte qui vole,
Cogne et tourne dans un coin
Sombre… On dirait une guêpe avide ou frivole
Qui butine ou lutine, aiguillonne ou frémit
Avec une ardeur folle