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et sans intérêt, et les poëtes qui l’avaient recueillie vers la moitié du quinzième siècle : Rodrigo Cota[1], Mendès de Sylva[2], Juan de la Encina[3], ne lui donnaient qu’une faible direction.

C’est alors, et longtemps avant tous les essais dramatiques des langues modernes, que parut la Célestine, la mère du drame castillan, et elle fut comme cette lueur qui précède la lumière, comme ce mot longtemps cherché qui aide au développement d’une grande idée. Ce n’était qu’un demi-siècle plus tard que Machiavel devait faire représenter la Mandragore et fixer les bases de la comédie régulière ; et la Célestine, réunissant déjà le coloris, l’originalité, la verve, l’intérêt d’action, la vérité des caractères, devenait la première pierre de ce grand monument qui a illustré l’Espagne et auquel ont concouru Torrès Naharro, Lope de Rueda, Cervantes, Oliva ; puis Lope de Vega, Calderon, Moreto et tant d’autres.


La Célestine, que les savants espagnols regardent comme la source de leur théâtre national, n’est pas positivement un drame, et un drame comme nous le voulons aujourd’hui, un drame comme ceux qu’ont écrits Calderon et Lope de Vega. À ceux-là, tels que les ont dictés les mœurs du seizième siècle, il faut du mouvement, de la brusquerie, une intrigue vive et animée, tous les accidents du hasard, toutes les folies de l’amour, toutes les féeries de l’imagination, toutes les pratiques de la dévotion et les rages de la vengeance,

  1. Dialogo entre el Amor y un Viejo. Dialogo pastoril entre Mingo Revulgo y Gil Arribato.
  2. Chronicas.
  3. Eglogas.