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Page:Rojas - Lavigne - La Celestine.djvu/266

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de cas de la gloire que j’ai eue entre mes mains ? Ingrats mortels ! vous ne savez apprécier le bien que lorsque vous l’avez perdu !

Lucrèce. Prenez courage, madame, il y aura pour vous plus grande honte si on vous trouve dans le verger, que vous n’avez eu de plaisir en y venant et de peine en le voyant mort. Entrons dans votre chambre, couchez-vous ; j’appellerai votre père, et nous feindrons un autre mal, car celui-ci ne peut se cacher.




ACTE VINGTIÈME


Argument : Lucrèce frappe à la porte de la chambre de Plebère, qui lui demande ce qu’elle veut. Lucrèce le prie d’aller voir sa fille. Plebère se lève et va à la chambre de Mélibée ; il la console et lui demande de quel mal elle souffre. Mélibée feint une douleur au cœur. Elle envoie son père chercher quelques instruments de musique et monte avec Lucrèce sur une tour ; elle renvoie Lucrèce et ferme la porte derrière elle. Plebère arrive au pied de la tour. Mélibée lui découvre tout ce qui s’est passé et enfin se précipite.


PLEBÈRE, LUCRÈCE, MÉLIBÉE.

Plebère. Que veux-tu, Lucrèce ? Pourquoi es-tu si pressée, si importune et si peu patiente ? Qu’est-il arrivé à ma fille ? Quel est donc ce mal si subit, que tu ne me donnes le temps ni de me vêtir ni de me lever ?

Lucrèce. Seigneur, hâtez-vous si vous voulez la voir vivante, car je ne puis reconnaître ni son mal, tant il est violent, ni elle-même, tant elle est défigurée.

Plebère. Allons vite, marche, passe devant.


Lève cette portière et ouvre bien ce volet, que je puisse voir sa figure. — Qu’est-ce, ma fille ? Quelle