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Page:Rojas - Lavigne - La Celestine.djvu/37

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quantité de sentences importantes, d’exemples, de conseils applicables à toutes les circonstances de la vie, qu’aucune autre langue ne possède rien de semblable. La langue espagnole est, il est vrai, si grave et si sonore, le style de l’auteur si élégant et si correct, sa diction si pure et si harmonieuse, que, de l’avis des Espagnols eux-mêmes, un bien petit nombre d’écrits pourraient égaler la Célestine en grâce, en élégance et en pureté.[1] »


J’ai maintenant quelques mots à dire à propos de la traduction. Attaquer de front une œuvre aussi célèbre que la Célestine, un monument littéraire aussi respecté, secouer d’une main profane la poussière qui depuis quatre siècles s’est accumulée sur ce vieux monument, c’était une entreprise hardie, et j’ai plus d’une fois reculé devant l’exécution. Mais, comme le sire de Lavardin, j’y rencontrais « de si délectables fontaines de philosophie », que j’ai chaque fois repris courage, que j’ai lutté avec ténacité contre des difficultés sans nombre, ne sachant encore si je suis parvenu à conduire à bonne fin cette œuvre presque impossible.

J’avais deux grandes choses à respecter dans la Célestine, d’abord le monument littéraire, puis la naïveté du style, ces sentences, ces nombreux proverbes dont il fallait imiter le rhythme, le laconisme, qu’il fallait rendre littéralement sans chercher le moins possible les équivalents dans notre langue. À cela j’ai mis tous mes efforts. Je n’ai pas

  1. L’auteur du Dialogo de las lenguas, savant critique qui vivait sous le règne de Charles-Quint, a dit aussi de la Celestine que la langue espagnole ne possédait aucun livre d’un style plus naturel, plus pur et plus élégant.