ments spécieux, sa mauvaise foi, son faux clinquant ; Burke, avec ses sophismes et sa politique des cours ; Mounier, dans une nouvelle diatribe[1] dont nous n’avons encore que l’énoncé, parce qu’elle ne fait que de paraître dans la capitale ; Tollendal[2], par un petit pamphlet où il a répandu de la chaleur et de l’énergie, tous ces gens et leurs écrits font un grand tort à la bonne cause. Ils flattent les passions des mécontents, ils séduisent les hommes légers, ils ébranlent les esprits faibles. Ôtez tous ces êtres de la société, comptez la classe ignorante qu’ils influencent à leur manière, et voyez le peu qui reste de bons esprits, de personnes éclairées pour résister au torrent et prêcher la vérité ! il est évident qu’on avait ménagé l’apparition de ces ouvrages pour le moment où devaient éclater de toutes parts les conjurations tendant an renversement de la Révolution. Les conspirateurs sont déjoués, il est vrai ; mais le poison de leurs maximes circule dans l’État, et les fautes de nos législateurs en facilitent les progrès. Je ne parle pas de l’arbitraire des impositions, qui révolte généralement, et d’une foule de détails répréhensibles ; mais la partie de la finance, ce principe moteur de la grande machine, est toujours traitée ou négligée avec une ignorance et une lâcheté intolérables ; l’aveuglement ou la partialité se décèlent à chaque pas ; d’un côté, l’on entasse les impôts avec une insouciance qui ne paraissait propre qu’au despotisme ; de l’autre, on prodigue les millions comme s’ils ne coûtaient rien au peuple qui les fournit. On vient encore d’en assigner aux princes, comme si nous étions obligés de les entretenir dans le faste asiatique. Ajoutez que l’Assemblée conserve sa sotte manie de travailler en marqueterie, qu’elle saute perpétuellement d’un objet à l’autre, et quelle laisse en arrière, sans qu’on sache pourquoi, des choses de la première importance, telles, par exemple, que l’organisation de la garde nationale, etc., tandis qu’elle s’amuse à changer le nom de la maréchaussée en conservant ce corps dont on aurait pu se passer. Tout va bien, dit-on, c’est-à-dire que le peuple animé sent le besoin de conserver la nouvelle Constitution : mais le fait est que cette Constitution n’est point achevée, que l’Assemblée se gâte et mollit de jour en jour, et que nous serons perdus si l’opinion
- ↑ Mounier, alors en Suisse, avait publié : Appel au tribunal de l’opinion publique du rapport de M. Chabroud et du Décret rendu par l’Assemblée nationale le 2 octobre 1790, Genève, 1790. — C’était une protestation contre le décret qui refusait d’autoriser les poursuites demandées par Le Châtelet de Paris contre Mirabeau et le duc d’Orléans, au sujet des journées d’octobre 1789.
- ↑ Quintus Capitolinus aux Romains, extrait du 3e livre de Tite-Live [Genève, novembre], 1790, in-8o.