testations : je vous demande s’il y a lieu d’être tranquille et satisfait. — Les Jacobins se sont assemblés ; ils étaient nombreux, ils ont eu de nobles élans, et le serment, car nous sommes devenus d’impitoyables jureurs, le serment d’être libre ou de mourir a été répété par eux avec transport.
[Robespierre[1] est monté à la tribune ; il a eu le courage d’exprimer, avec l’énergie propre à son caractère, ce dont je ne viens que de vous transmettre l’énoncé ; on sentait que son cœur, opprimé de la mollesse de l’Assemblée, de la corruption d’une partie d’elle-même, venait s’épancher dans une société autrefois célèbre, et que les circonstances rappelleraient peut-être à la pureté de son origine ; Robespierre a été couvert d’applaudissements ; ils étaient bien mérités. Mais, bientôt après, arriva tout le Club de 89, Lafayette à la tête. Le vigoureux Danton[2] déploya vainement son éloquence contre le commandant et l’inculpa hautement. Lafayette, sans se justifier de rien, fit parade de son zèle, parla de liberté, et on l’applaudit. Sieyès et d’autres parlèrent à leur tour, s’élevant contre les défiances qu’ils prétendaient devoir être soigneusement écartées ; Barnave renchérit sur le tout en prêchant l’union et proposant une adresse concise à toutes les Sociétés affiliées, rédigée dans ces principes et cet esprit. Elle fut adoptée.] Voilà tout le résultat de l’une des plus brûlantes séances de cette Société, qui devrait être le foyer des meilleures résolutions, et cela, dans les circonstances les plus graves et les plus décisives où nous nous soyons encore trouvés[3].
J’étais, au commencement de la journée d’hier, dans l’activité des plus grandes espérances ; je suis maintenant dans l’inquiétude et la crainte. Je voudrais répandre l’une et l’autre ; je voyais que, depuis six mois, on ne travaillait qu’à nous endormir ; j’ai souri au moment d’un réveil, et j’aperçois avec effroi qu’on s’efforce de nous calmer de la même manière. Nous n’avons que des liens presque imperceptibles ; ils seront rivés en fer avant que nous en jugions toute la force.
Lorsque je considère que, dans notre Constitution, les ministres étaient plus que le Roi lui-même par leur action continuelle ; que les ministres en place sont dévoués à l’aristocratie, et qu’ils sont continués dans leurs fonctions avec
- ↑ Tout le passage que nous mettons entre crochets a été biffé dans l’autographe, évidemment à une date postérieure.
- ↑ C’est la première fois que Madame Roland nomme Danton. Par un ressouvenir de l’orthographe du nom avant le décret du 19 juin 1790, elle écrit « dAnton ». De même à la lettre 448.
- ↑ Voir le procès-verbal de cette séance dans Aulard, Jacobins, II, 531-538.