Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/1242

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une sorte d’effroi tout ce qu’il y a à faire et tous les obstacles à vaincre pour opérer le bien. S’il est possible, nous sommes heureux ; s’il ne l’est pas, nous reprendrons les goûts paisibles, les habitudes douces et studieuses qui remplissaient nos loisirs. Maintenant il faut s’élever à la hauteur de sa destinée, ne respirer que pour la remplir et ne pas avoir une pensée qui ne tende efficacement au but qu’il faut atteindre.

Ne nous oubliez point ; écrivez-nous quelquefois, surtout quand vous découvrirez des vérités à nous communiquer, et ne cessez pas d’aimer ceux qui vous chérissent affectueusement. Rien ne saurait altérer des sentiments qui tiennent aux principes invariables de la justice et de la liberté. Recevez nos embrassements fraternels et plaignez-moi de la rapidité qu’il me faut mettre dans ma correspondance.


472

[À ROBESPIERRE, À PARIS[1].]
27 mars 1792, — de Paris.

Vous me justifiez. Monsieur, et j’en reçois une joie que je vous laisse à juger, parce que vous êtes fait pour l’apprécier ; mais je suis aussi très aise d’avoir été prévenue, et j’aime à vous voir cet avantage. Je reste à l’Hôtel Britannique, du moins pour quelque temps ; vous

  1. Papiers Roland, ms. 9533, fol. 216-217, copie. — L’original a passé par les ventes d’autographes (n° 906 de la vente des 31 janvier 1854 et jours suivants, Laverdet, expert ; n°399 de la vente du 19 novembre 1863, Charavay, expert. — La copie porte l’indication suivante : « N° 18 de la collection de M. Clauss, à Leipzig ».

    Nous croyons que la lettre est adressée à Robespierre, parce que l’expression « à la tête de la classe des sages patriotes » ne peut guère, à cette date et sous la plume de Madame Roland, s’adresser qu’à lui ou à Brissot. Or, le tour et le ton de la lettre excluent Brissot, un vieil ami, et qui avait fait Roland ministre.

    On lit d’ailleurs en tête de la copie figurée, tirée de la collection Clauss : « Lettre de la femme Roland », et une note du copiste déclare que ces mots paraissent avoir été écrits presque en même temps que la lettre elle-même. On peut donc présumer qu’ils ont été écrits par le destinataire et que ce destinataire n’était pas un des amis des Roland.

    Notons, d’autre part, que cette lettre a fait partie un instant de la collection Coste, de Lyon, dont le catalogue (n° 16122) la cite