Le temps fera tout connaître ; sa justice est lente, mais sûre ; elle fait l’espoir et la consolation des gens de bien. J’attendrai d’elle la confirmation ou la justification de mon estime pour ceux qui en sont l’objet. C’est à vous, Monsieur, de considérer que cette justice du temps doit à jamais éterniser votre gloire ou l’anéantir pour toujours.
Pardonnez-moi cette austérité d’impression ; elle tient à celle des principes que je professe, des sentiments qui m’animent, et je ne sais jamais paraître que ce que je suis.
Je reçois le forte-piano[2] avec plaisir, et votre lettre avec satisfaction et reconnaissance. Je n’ai pas moins de désir que vous d’avoir quelques moments à me retrouver avec mes amis.
Je serai constamment en famille les dimanche et mercredi ; souvent même aussi le mardi et quelquefois le vendredi ; j’aurai du monde les lundi et jeudi.
Ainsi venez me voir et dîner avec moi les deux premiers jours ; mais il y aura le désagrément de n’avoir pas mon mari, tandis que le mardi je l’aurai constamment.
Lorsque les premiers embarras seront passés, je prendrai aussi quelques moments pour aller à Monceau[3] chez l’excellent Gibert, et
- ↑ Collection Alfred Morrison. — Ce n’est que très approximativement que nous donnons, par hypothèse, la date d’avril 1792. Il n’en semble pas moins que cette lettre est des premières semaines du ministère de Roland.
- ↑ Sand doute le forte-piano que, dans la nuit du 31 mai au 1er juin 1793, un des commissaires qui arrêtèrent Madame Roland voulait mettre sous scellés (Mém., t. I, p. 21).
- ↑ Su Gibert, voit note du 19 novembre 1785. — On sait qu’il était, comme Bosc, employé des Postes. Il en devint, comme lui, administrateur en mai 1792. Nous voyons par ce billet qu’il habitait à Monceaux, ce village de la banlieu de paris.
tituons à cette lettre. La question a son importance historique. C’est pour avoir cru que la lettre était du mois d’août que M. Hamel a reporté à cette date la rupture entre Robespierre et les Roland.