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Mon cocher ne peut vous servir parce qu’il n’a que deux voitures, et qu’elles sont employées, l’une pour M. Clavière. Il n’est point anciennement établi, c’est un enfant du nouveau régime. J’envoie chercher le loueur de carrosse de M. Petion, afin de vous éviter l’ennui des détails, et je vous l’adresserai dès que je l’aurai vu. Disposez de moi pour tout ce que vous jugerez bon.

Lorsque vous pourrez vous arracher aux affaires et venir manger ma soupe, je vous recevrai avec reconnaissance ; j’en aurai infiniment lorsque vous me procurerez l’occasion de vous être utile. Ainsi ne m’épargnez point pour les détails qui pourraient vous être à charge. Nos amis vous embrassent ; vous voilà compagnons d’armes et de fortune : il faut sauver la chose publique ou périr avec elle.


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À SERVAN, [À PARIS[1].]
Le matin du 10 mai, l’an iv (1792), — [de Paris].

Quelqu’un de nos amis prétendait, avant que vous fussiez au ministère, que vous aviez un peu trop de feu. J’ai prétendu que vous n’auriez peut-être pas encore assez de ce trop, parce qu’il en fallait beaucoup pour se trouver ce que l’on doit dans une situation où tout enchaîne, arrête et amortit.

Jusqu’à présent, on peut excuser le nouveau ministère de n’avoir pas fait tout ce qu’on attendait de lui : il était entravé par un ci-devant[2]. Maintenant que vous êtes tous plébéiens, ou à peu près, et vrais révolutionnaires, si d’ici à quinze jours vous n’avez pas déployé un grand caractère et des mesures imposantes, il sera démontré que

  1. Ms. 9533, fol. 211. — M. Faugère en a donné quelques lignes dans son édition des Mémoires (I, 268). Il avait acquis l’autographe à la vente du 7 avril 1864, Charavay, expert. Une note de l’autographe dit : « Lettre de Madame Roland au général Servan ».
  2. De Grave, auquel Servan succédait.