Condorcet. Il écrivait d’ailleurs à Fougeroux, le même jour : « Les faits de mon Introduction, tous constants, avoués, publics, dont j’ai la certitude et dont je donne la preuve, tous étaient renfermés dans le manuscrit exposé sous les yeux de l’Académie. Comment aurais-je supposé qu’il y eût rien d’offensant pour personne ? Et si ce qu’on juge tel aujourd’hui a pu vous échapper. Monsieur, parce que, suivant l’observation de M. de Montigny, vous ne connaissiez pas M. Holker, comment le public en aurait-il été frappé, et qu’est-ce que ce peut être en soi ?
« J’étais si peu fait pour rien soustraire aux yeux de l’Académie, et pour insérer dans l’ouvrage quoi que ce fût qu’elle n’eût approuvé, que j’ai relaté à la fin et scrupuleusement désigné les additions que j’avais faites à l’Art depuis son examen… »
Roland a beau protester de sa candeur, le mauvais tour joué à Holker n’en est pas moins visible : oui, tous les faits rassemblés dans son Avertissement étaient épars dans le mémoire que l’Académie avait eu sous les yeux ; mais cet Avertissement lui-même, avec l’omission voulue du nom de Holker, avec la phrase méprisante sur « le calandreur de Manchester », y était-il ? Ou bien, s’il s’y trouvait, avait-il échappé à M. de Montigny ? C’est ce que nous n’avons pu démêler.
Dans une lettre datée du 20 juillet, à M. Tillet, Roland prend condamnation, et préfère supprimer son Avertissement que d’y retoucher quoi que ce soit : « Que des considérations particulières fassent trouver bon de le supprimer, je ne prétends point juger ces considérations ; qu’on supprime en effet, je ne m’en soucie nullement et je m’en inquiète aussi peu. Des changements, un carton, etc… pourraient ne satisfaire personne, ce qu’on éviterait en ôtant cette Introduction ; c’est un feuillet à déchirer. Rien au monde assurément ne me ferait dire autre chose que la vérité ; mais que l’on s’oppose à sa publicité, c’est ce qui ne m’importe en aucune façon, pour un fait de cette nature… ».
En somme, l’Avertissement fut supprimé dans les exemplaires qui n’étaient pas encore en circulation. Roland n’en avait pas moins fait sa retraite en bon ordre. Il portait, en outre, à Holker, deux coups droits : 1° en publiant, fin juin 1781, au moment même où il allait avoir à se débattre avec l’Académie, une vive riposte : Réponse à la lettre d’un soi-disant citoyen de Villefranche. (On voit en effet, par sa lettre du 5 juillet à M. de Montigny, que cette Réponse avait déjà paru à cette date) ; 2° en laissant imprimer, en octobre 1781 — probablement par son ami M. Baillière, le chimiste rouennais — deux lettres sanglantes contre le puissant manufacturier de Saint-Sever.
La première de ces lettres, datée du 15 septembre, était intitulée : Première lettre de M. D.B., membre de l’Académie de Rouen, à M. A.D.C., de l’Académie des Sciences de Paris. Les initiales D.B. désignent certainement Denis Baillière. Mais nous ne voyons, parmi les membres de l’Académie des Sciences, que Condorcet (Jean-Antoine-Nicolas), à qui les initiales A.D.C. puissent convenir. Baillière voulait-il le compromettre dans la querelle ?
Cette lettre, dont nous avons déjà extrait l’apologie de Roland et quelques diatribes contre Holker, se termine, en réponss au manufacturier de Rouen, — qui se vantait que l’Académie avait ordonné la suppression de l’Introduction, qu’il en avait en poche l’aveu écrit et signé de M. de Montigny lui-même, — par ces ligues railleuses :
« Nous voyons, en effet, qu’on a supprimé l’Introduction ; mais le rapport des commis-