Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/1492

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de temps en prison : la liste des personnes emprisonnées à Amiens pendant la Terreur, qu’a publiée M. Daray[1], porte : « Pierre Flesselles, négociant à Amiens, ex-administrateur ; se constitue prisonnier à la Providence le 12 novembre 1793, pour obéir à un arrêté d’André Dumont et de Joseph Lebon, du 2 septembre. — Sorti le 21 ».

Nous le perdons ensuite de vue.

Nous avons, sur Delamorlière, un article des plus intéressants dans la Biographie des hommes célèbres, des savants, des artistes et des littérateurs du département de la Somme (Amiens, 1835-1838, 3 vol. in-8o). En voici un résumé :

Jean-Baptiste-Jacques Delamorlière, né à Amiens, le 11 novembre 1740, fils d’un teinturier. Il fit de bonnes études ; rentré à la maison paternelle à quinze ans (son père étant déjà mort et sa mère remariée), il alla ensuite parcourir, pour s’instruire, les principales villes du Midi. Ayant perdu son beau-père, il prit la direction de la teinturerie, « se livra à l’étude de la chimie, se mit en rapports avec des savants distingués, avec Roland de La Platière… Éclairé par la théorie et la pratique, il agrandit son état et la fortune couronna ses efforts… ».

La Biographie nous apprend, — ce que la Correspondance indique aussi, — qu’il était beau-frère de Flesselles (sans nous faire connaître lequel avait épousé la sœur de l’autre), et qu’il s’était associé à lui « pour l’importation des apprêts anglais qui firent faire un pas de plus à l’industrie d’Amiens… ».

Elle ajoute « qu’il mit des fonds dans l’entreprise fondée à l’Épine, près d’Arpajon, par Jacques-François Martin, son frère utérin, qui, le premier, importa en France les machines perfectionnées d’Arkwright pour la filature continue du coton tors par chaîne… ». (Ici, un renvoi aux passages du Dictionnaire de Roland, que nous avons déjà cités.)

Nous retrouvons le nom de Delamorlière en 1789, parmi les 83 citoyens dévoués qui se constituèrent, le 15 juin, en Société civique pour assurer la subsistance en grains de la ville d’Amiens jusqu’au 1er septembre suivant, c’est-à-dire jusqu’à ce que la récolte de l’année fût effectuée. (Darsy, op. cit., p. 87.)

En 1792, Delamorlière était devenu non seulement notable, comme son beau-frère Flesselles, mais officier municipal : il était, en outre, administrateur de l’hôpital et du bureau de charité ; il était même entré à l’Académie d’Amiens (c’est la première fois, croyons-nous, que cette compagnie aristocratique admettait un teinturier parmi ses membres). — Voir Alm. de la Somme, 1792, p. 69, 73, 80 et 102.

La Biographie parle « du courage héroïque que Delamorlière montra pendant la Révolution », et ajoute qu’il fut incarcéré sous la Terreur. Nous ne trouvons pas entendant son nom sur la liste de M. Darsy.

Il mourut le 25 novembre 1812, laissant dix enfants (sur vingt et un qu’il avait eus de deux mariages).

De Jacques-François Martin, nous ne savons rien de plus que ce qui vient d’être dit à propos de Flesselles et de Delamorlière.

  1. Les doléances du peuple et les victimes, souvenirs de la Révolution en Picardie, Amiens, 1887, 1 vol. in-8o, p. 136 et suiv.