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1790) en donnera une idée : « J’ai fait un voyage à pied, de Lyon à la Chartreuse de Sainte-Croix, entre Rive-de-Gier près Saint-Chamond et Condrieu. J’ai traversé des montagnes intéressantes et j’ai, tout le long de ma route, catéchisé les paysans. J’ai vu exercer la garde nationale d’un village appelé Longes, à une lieue de cette Chartreuse, et j’ai appris avec satisfaction que la municipalité de ce village venait de dépenser 1,500 livres pour armer ses citoyens. Je n’ai cessé d’inviter partout à en faire de même et j’ose croire que ma mission patriotique ne sera pas sans fruit… »

Il y a aussi, aux Papiers Roland, ms. 9534, fol. 243-248, deux lettres à Bancal, du 4 octobre (Bancal avait quitté le Clos deux jours auparavant) et du 9 novembre 1790. Dans celle-ci, il rend compte d’une visite qu’il a faite au prieuré de Montroman, près Villefranche[1], joli bien de moines, dont il fait une description fort agréable, et qu’il propose encore d’acheter en commun.

Signalons aussi une lettre de Brissot, du 18 septembre 1790 (ms. 9534, fol. 54), que Lanthenas reçut au Clos, et nous aurons relevé tout ce qui se rapporte à ce séjour. Quant à son rôle à Lyon dans cet hiver de 1790 à 1791, il a été très suffisamment indiqué par M. Wahl, dans son livre que nous avons si souvent cité. Ajoutons seulement que, tout en évangélisant les ouvriers et les paysans, Lanthenas ne se lassait pas d’écrire ; il adressait de Lyon au Courrier de Provence (n° 231, p. 62) des « Réflexions sur le peuple, par rapport à la Révolution ». Il dit, dans une lettre à Bancal, du 26 octobre (voir ci-dessus, p. 185) : « J’ai envoyé dernièrement à Brissot un article pour son journal, que j’ai intitulé ainsi : Quand le peuple est mûr pour la liberté, une nation est toujours digne d’être libre. » M. Dauban (Étude, p. ccli) s’est moqué de ce titre, après l’avoir d’ailleurs défiguré. Or Lanthenas, qui travaillait alors à faire l’éducation de la démocratie lyonnaise, sait bien ce qu’il veut dire en opposant les termes peuple et nation. Seulement, selon son habitude, il n’a pas su être clair, et c’est pour cela, sans nul doute, que Brissot n’a pas inséré.

Roland, sur ces entrefaites, devenu officier municipal de Lyon, avait été chargé par la ville d’aller demander à la Constituante que la dette municipale fût déclarée dette nationale. Il se mit en route avec sa femme le 10 février 1791, et arriva à Paris le 15. Lanthenas les accompagna.


§ 8. Lanthenas aux Jacobins.

Il se logea avec ses amis à l’hôtel Britannique, rue Guénégaud, et reprit aussitôt son rôle de publiciste et d’agitateur. On a vu d’ailleurs que, pendant les cinq mois passés en Beaujolais et à Lyon, il ne s’était guère arrêté.

Il poussait avec ardeur quatre idées :

1° L’armement des citoyens actifs, pour s’imprimer les armées permanentes. Il y reviendra en septembre 1792 ;

2° La suppression du privilège des aînés (voir ci-dessus, p. 178 et 217, ses lettres des 15 octobre 1790 et 10 janvier 1791, à Bancal ; Cf. Patriote français, des 15 novembre et 6 décembre 1790, 17 janvier 1791).

  1. Commune de Denicé.