Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/154

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de toutes tes inquiétudes. Tu as reçu présentement de mes nouvelles et tu auras vu dans leur retard la suite d’une seule erreur, du renvoi de ta 1re lettre. Je la pressentais, et je ne saurais dire comment j’ai pu la commettre, puisque tu n’avais point oublié le signe convenu ; mon impatience me l’a fait bien payer ; mais c’est trop de tes tourments ; je donnerai tant pour les racheter ! fout-il que j’aie ajouté à ceux que te causaient mille contrariétés !

Les tracasseries de M. Tolozan[1] ne m’étonnent pas, quoiqu’elles m’agacent assez ; elles sont une suite naturelle de son humeur taquine et brouillonne ; je parierais qu’il a aussi voulu laver la tête à Hr [Holker] ; il faut bien qu’il gronde, pour être et pour paraître faire quelque chose. Au reste, j’augurerais aisément du jugement des autres Intendants par le sien, en suivant la règle des contraires ; principalement sur le travail et les Académies. Sa sortie à ce sujet me semble aussi pitoyable et risible que l’admiration de MM. du Musée pour leur propre excellence. Pour lui faire pièce, il faut encore augmenter la kyrielle du nom de Berlin.

Je t’envoie ce que j’ai fait à cette occasion. Je crois que les faiseurs d’épîtres ne trouveraient pas les mots de Sire, V. Majesté, etc., assez souvent ramenés, mais je crois aussi que ces faiseurs ne sont pas des

  1. Jean-François Tolozan, un des quatre intendants du Commerce. La Picardie n’était pas dans son département, mais Roland relevait de lui pour « les manufactures de bas et autre ouvrages de bonneterie » (Almanach royal de 1783, p. 224). — Voir sur lui Appendice F.

    Roland avait écrit à sa femme, le 18 novembre (ms. 6240, fol. 98-99) : « M. Tolozan, le seul que j’aie vu des Intendants du commerce, m’a fait une vespérie du diable de l’affaire de H. (Holker) et du ton de ma correspondance, etc… il m’a dit que H. avait eut tort d’écrire ; que, s’il ne l’avait pas fait, il aurait bien trouvé le doyen de lui faire rendre justice ; mais qu’ayant voulu se la faire, il avait perdu le droit de le demander ; mais que j’avais tort, etc. ; à quoi je ne suis pas toujours resté muet… Puis il a beaucoup tiraillé sur les inspecteurs qui étaient des académiciens, qui écrivaient, etc. ; que cela ne convenait point à l’administration, et qu’elle trouverait bien le moyen de les en empêcher, etc. Il a cité, comme ainsi malavisés, Desmarets, Brisson et moi ; je crois en effet qu’il n’en accusera guère d’autres d’être de quelque Académie, ni d’écrire. Tu juges que, dans ces circonstances, je ne répandrai point l’écrit » (un pamphlet de son ami Baillière contre Holker, Lettres imprimés à Rouen en octobre 1781. Voir Appendice G.).