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Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/463

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[À ROLAND, À AMIENS[1].]
Jeudi, 29 avril 1784, — [de Paris].

Je viens de l’hôtel de Noailles ; j’ai pris une voiture ; j’étais aussi faible que si j’eusse été malade véritablement ; c’est l’effet des sueurs qui ont presque chassé mon rhume, dont il me reste fort peu de chose. J’étais si faible et le moral s’en ressentait si bien, qu’en revenant et voyant ce triste Paris, fourmilière d’intrigants et cloaque de toutes les ordures, puis soupirant après toi et mon Eudora que je ne vois plus, j ai pleuré comme un enfant.

M. Faucon ne me fait pas grandement espérer de la résolution de notre homme à faire intervenir la Reine ; j’ai parlé aussi clair que je le pouvais sans casser les vitres ; nous verrous encore à Versailles. Je viens d’écrire à l’abbé Gloutier une longue lettre qui ne se ressent point de ma faiblesse, j’y expose le gros des choses pour qu’il le communique à Mme d’Arb[ouville], qui aura le temps d’y réfléchir avant que je la voie, ce dont j’espère tirer un meilleur parti. J’ai aussi récrit à M. Valioud pour lui rappeler de s’informer le plus tôt possible du résultat du Comité, dont j’enverrai savoir des nouvelles samedi matin, si je n’y vais moi-même.

Je vais cet après-midi avec les chers amis, frère et sœur, à Charenton ; je verrai un savant intéressant[2], que j’ai déjà vu, qui pourra nous donner quelques lettres pour l’Angleterre. Je dois voir des tissus faits d’une filasse dont je te porterai des échantillons, bien supérieure à celle de nos chanvres et lins, et qui provient d’une plante de la Zélande.

Flesselles a eu hier M. de Flesselles ; les machines de Mill[3], tant

  1. Ms. 6239, fol. 63-64.
  2. Broussonnet.
  3. Les machines à filer le coton que les sieurs Miln faisaient marcher à Neuville-sur-Saône, près de Lyon (voir, Dict. des manuf., t. II, p. 137). — Voir l’Appendice I.