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Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/779

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On vient de m’interrompre, on m’a pris une demi-heure ; il m’arrive des ouvriers que j’ai employés au Clos et que je vais solder. Adieu ; amtiés, salut et embrassements à vous et à l’ami Lanthenas.


277

[À ROLAND, À LYON[1].]
Mercredi soir, (?) août 1787, — [de Villefranche].

1° Je me porte bien ; je t’aime à la folie et je me sens disposée à me ficher de tout le reste ; partant, paix et bonheur. Si l’on nous vexe, il te restera toujours une pension et ta femme, et à moi assez, dès que tu seras content. L’histoire de l’intrigante est exagérée, par cela seul qu’on en parle ; quand on veut souffler une place à quelqu’un, on ne commence par s’en vanter de manière à ce qu’il en soit averti. Au reste, qu’elle fasse : tu as des droits, et je les ferais valoir au besoin : dans ce siècle de singularités, il serait possible que l’honnêteté réussît une fois contre la bassesse.

J’avais froid quand tu es parti ; je me suis fait prodigieusement couvrir : j’ai mijoté ainsi durant deux heures ; il s’est enfin établi une forte transpiration ; de ce moment, tout a pris son cours.

J’ai été au bal, après l’invitation bien entendu, et à cause du jeune homme[2] qui paraissait en avoir envie. Quand il a vu danser et qu’il n’a pas retrouvé les contre-danses de son pays, la peur l’a pris : jamais je n’ai vu si plaisant contraste de désir et d’appréhension ; enfin il s’est enhardi et s’en est passablement tiré, mais une fois seulement, car sa timidité l’avait retenu jusqu’à une heure, et je ne voulais pas rester plus longtemps. Il a quitté de fort bonne grâce et je suis revenue avec M. Pezant, qui m’avait tenu fidèle compagnie, car je n’avais pas

  1. Ms. 6239, fol. 201-202.
  2. Le fils de Cousin-Despréaux, le viel ami que Roland avait à Dieppe. Son père l’avait envoyé faire auprès de Roland un apprentissage d’élève-inspecteur des manufactures (voir lettres suivantes, notamment du 18 novembre 1787). Il semble que l’essai n’ai pas été heureux.