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On parle maintenant de 15,000 hommes à fixer à Lyon ou tout autour d’elle. Il est question de former un camp sur le local où fut placé celui de la Fédération. On logera des régiments à Trévoux, d’autres à Villefranche, etc.

Je ne vous donne pas cela pour des faits incontestables, mais pour des choses qui se disent hautement ; et l’un des municipaux de Villefranche fait aujourd’hui des démarches pour s’assurer s’il est vrai que l’on doive loger 900 hommes dans cette petite ville, parce qu’il aura, dans le cas de l’affirmative, de fortes représentations à faire. On dit qu’on veut désarmer tout Lyon.

Je vous laisse à juger si toutes ces choses ont des rapports avec ce que je vous marquais dans ma dernière de Lyon même.

Plaise au ciel que le patriote qui me les représentait se soit entièrement trompé ! Plaise au ciel que je voie trouble et que j’aie le plus grand tort, en apercevant ici la marche ministérielle et la contre-révolution !

Quels que soient les événements auxquels nous soyons réservés, je ne gémirai que sur ma patrie, je me consolerai de mes propres maux si le bien général s’opère ; ce bien seul aura tous mes vœux et, s’il ne peut s’effectuer, j’en regretterai moins la vie, mais je pourrai la quitter, à quelque moment qu’il le faille, sans qu’on me surprenne avec un soupir indigne de qui sait être citoyenne et amie.

Nous vous attendons.


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À M. HENRY BANCAL, À PARIS[1].
11 août 1790, l’an ii de la liberté, — [du Clos].

Je présume que cette lettre sera la dernière que je vous adresserai à Paris pour cette fois ; je la fais dans cette idée avec un plaisir particulier. Je vous confesserai cependant, pour ne rien taire à l’amitié, que si je ne croyais à votre voyage un autre but que de venir nous voir, je ne serais pas sans scrupule. La chose publique me semble requérir aussi instamment que jamais l’œil et l’action des bons patriotes dans la capitale. L’Assemblée a besoin d’être surveillée, incitée ; les sociétés, les clubs peuvent seuls remplir cet objet par des pétitions

  1. Lettres à Bancal, p. 43 ; — ms. 9534, fol. 33-35. La lettre, portant le timbre de la poste de Villefranche, est adressée « à Monsieur Henry Bancal, chez M. Bro, notaire, rue du Petit-Bourbon, à Paris ». Il y a en marge : « Rép. le 16 ».