du bien, inspirées par les mêmes penchants, doit charmer leur existence et lui donner un nouveau prix ; sans doute, les vertus qu’une telle affection peut développer ou nourrir doivent tourner au profit de la société, comme à la gloire de ceux qu’elle anime ; telles sont les bases de ma confiance et le rocher auquel je me retrouve attachée, même dans les plus fortes agitations de la tempête.
Mais qui put prévoir l’effet d’agitations violentes ou trop fréquemment renouvelées ? Et ne seraient-elles pas redoutables quand elles n’en auraient d’autre que cette langueur qui leur succède, qui altère passagèrement l’être moral et ne le laisse plus au niveau de sa situation ? Je m’abuse ; vous n’éprouvez point cette indigne alternative ; vous pouvez être quelquefois attristé, mais vous ne sauriez jamais être faible, et il n’y a que la faiblesse qui conduise à l’abattement ou puisse amener les fâcheux excès. L’impétuosité naturelle à votre sexe, l’activité d’une ardente imagination ne produisent que de légères erreurs, semblables à celles d’un songe fugitif, lorsqu’un sentiment profond alimente le cœur et purifie dans son feu sacré ces vaines illusions. L’idée de votre force me rend toute la mienne ; je saurai goûter la félicité que le ciel m’a départie, en songeant qu’il n’a point permis que j’aie troublé la vôtre et qu’il m’a même accordé quelques moyens de l’accroître. Que de bénédictions ne lui devrai-je pas ?… Comme cette douce espérance embellit mon horizon ! C’est le rayon bienfaisant qui fait sourire la terre et rend au ciel sa sérénité ! Entretenez-moi, ou plutôt instruisez-nous toujours de votre marche, de vos projets, de ce que vous savez de la chose publique, de ce que vous vous proposez pour elle. Au sein de votre famille, vous y êtes sûrement accueilli avec tendresse et vous vous y sentez avec joie ; joie douce et pure, qu’il est donné à si peu de personnes de goûter ! J’aime à me représenter votre vieil et respectable père, ravi de vous embrasser, et à vous voir dans ses bras, savourant ces saintes affections que nos mœurs corrompues ont rendues si rares. Hélas ! vous vous éloignerez bientôt… Mais vous vous rendrez au centre où la patrie semble appeler actuellement ceux qui peuvent la bien servir, parce qu’elle a besoin de les y rassembler ; si la distance devient alors plus grande entre nos habitations, du moins les communications seront aussi promptes.
D’où vient que cette feuille que j’écris ne put-elle vous être envoyée sans mystère ? Pourquoi ne peut-on laisser voir à tous les yeux ce que l’on oserait offrir à la divinité même ?