j’ai essayé de pénétrer plus avant dans le gouffre de ce silence. Je rapporte ici les fruits de ma nouvelle plongée. Le fait nouveau qui prime tous les autres est celui-ci : Pendant cette période de quinze années, Goethe a eu sous la main, à Weimar, tous les moyens d’être abondamment informé sur Beethoven — l’homme et l’œuvre. Et il y a tout lieu de penser qu’il le fut. A partir de 1813, Gœthe a constamment près de lui un ami qui lui est cher, excellent pianiste et organiste, Joli. Heinr. Friedrich Schütz, inspecteur des bains de Berka, à trois heures de Weimar. Ils voisinent ; et Schütz lui joue les maîtres allemands, pendant des heures. A la vérité, il est surtout un passionné de J. S. Bach, et il communique cette passion à Gœthe. Mais il lui jouait aussi du Beethoven. Un autre familier de la maison de Gœthe était, lui, voué entièrement, uniquement, à Beethoven. Je l’ai mentionné dans mon Etude précédente : c’était le conseiller secret d’Etat (Geheime Regierungsrat ) Friedrich Schmidt. Cet homme aimable et estimé était un apôtre enthousiaste. Il composait des sonnets, dont chacun était dédié à une œuvre de Beethoven. Il savait ses sonates par cœur et jouait presque exclusivement sa musique, — sans doute (d’après les souvenirs de Ferdinand Miller, enfant), « avec plus d’intelligence que de
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