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Page:Rolland - Beethoven, 2.djvu/136

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GŒTHE ET BEETHOVEN

au-dessus. Que ce serait beau, que ce serait nécessaire, si je pouvais être auprès de toi ! Tu me guérirais de mon excitabilité maladive (von einer krankhaften Reizbarkeit), et tu me rendrais, petit à petit, capable d’accueillir en moi la plénitude de la plus belle révélation de Dieu (die ganze Fülle der schonsten Offenbarung Gottes in mich aufzunehmen). Au lieu de cela, je vois venir un hiver dénué de sons et de formes (klang und formlosen), Et j’en frissonne... (vor dem mir denn doch gewissermassen graut)... »

Ce vieux grand homme emmuré dans sa solitude glacée ! Qui ne sentirait son cœur percé, en écoutant cette confidence !... Mais qui l’emmure ?

Quelle étrange peur de sortir de sa prison ?
L’Allemagne est pleine d’amis qui l’appellent. 

A Berlin, le fidèle Zelter languit de sa venue, depuis vingt ans ; et tout Berlin, la cour, l’élite, les multitudes où se sont, par les lieder de Zelter et de Reichardt, répandus son souille et l’amoureuse vénération de son nom, tous l’attendent avidement. Il ne viendra point. Il n’tura jamais vu Vienne ! Il se défend... Contre qui donc ? Contre le bonheur ? Contre la gloire ? Contre le regard ?... Ah ! qu’il est peu sûr de lui-même !... Mais il se connaît ! Et nous voyons quel chef-d’œuvre il a sculpté, avec son être. Ne J»i discutons pas ses moyens ! Il est un sage. Il sait les gouffres dont il a à se défendre... Donc, il rentre, le cœur gelé, dans son hiver¬