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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/185

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LE CHANT DE LA RÉSURRECTION

Wonne der Wehmut, où Beethoven ne craint pas de répéter et de forcer les mots, — où le lied entier n’est qu’une seule phrase entrecoupée, — où la partie instrumentale déborde sur la voix, l’enveloppe, la porte, est l’expression palpitante non de la bouche, mais du cœur !… Beethoven savait ce qu’il faisait. Il sentait, aussi bien que Goethe, le prix de telles poésies musicales ; mais il prétendait ne pas s’asservir au rôle d’accompagnateur ; il ne consentait à les reprendre en musique qu’à condition d’en dégager musicalement l’essence, — fut-ce en la récrivant en son propre style ; il n’était pas sans se flatter qu’il pouvait ainsi la redire mieux, plus vraie, plus intense que le poète. Il n’allait, naturellement, pas le déclarer à celui-ci ! Mais à Czerny, en confidence, il se laisse aller à dire :

— « Le musicien doit savoir s’élever loin au-dessus du poète[1] »

Et il a l’aplomb d’ajouter :

— « Qui le peut, avec Schiller ? Mais avec Goethe, c’est beaucoup plus facile ».

Il est clair qu’une telle parole doit être interprétée. Qui connaît l’amour ardent et la vénération que Beethoven professa toujours pour le génie — sinon toujours pour la personne — de Goethe, est assuré qu’il n’est jamais venu à l’idée de Beethoven de prétendre le surpasser, et surtout d’y réussir si aisément ! Mais il veut dire sans doute que cette poésie, qui par moments lui est si proche, lui offre, par la noble retenue de son expression, par son pouvoir

  1. « Der Tonsetzer muss sich weit über den Dichter zu erheben wissen… »
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