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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/341

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LE CHANT DE LA RÉSURRECTION

qu’il peut se permettre cio jongler avec le matériel thématique en rythmes accentués et heurtés, et libres modulations, — mais sans violences excessives : — (l’intensité se maintient, presque jusqu’à la dernière page, à un degré moyen, ne dépassant pas le f., mais avec de fréquents accents brusqués sf.). — On ne doit pas s’y tromper, dans l’exécution, où l’on risquerait d’être égaré par ces mots d’« ouragan » et de « Pélions de sonorité entassés sur des Ossas de rythme » [1]. C’est un beau jeu riant. Beethoven n’y dépense pas les ff., qu’il a réservés au premier morceau, et qu’il garde seulement pour la conclusion. Il est économe de ses moyens, beaucoup plus qu’on ne pense. Le ff. de la 4e mesure est exceptionnel ; et lui succède immédiatement un p.

À ce propos, je suis d’accord avec August Halm, quand il dénonce l’erreur d’exécution ordinaire, qui tend à rendre l’énergie et l’impétuosité du style beethovenien, par un jeu rude et violent. Évidemment, cette interprétation s’explique par l’image qu’on se représente de Beethoven, d’après la trop fameuse boutade :

— « Croyez-vous que je ni occupe des besoins d’un sacré violon, quand l’esprit me parle ? »

Mais c’est une boutade, et rien de plus. Et l’esprit qui parlait à Beethoven était toujours l’esprit du violon, ou de l’instrument[2] qu’il choisissait pour interprète. Il était

  1. Alfred Cortot.
  2. Mais, il est vrai, de l’instrument parfait, parvenu au plus haut point de sa puissance. Les dernières sonates supposaient tous les perfectionnements apportés depuis au piano.