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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/484

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BEETHOVEN

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Très vite, dès la cinquième mesure x, l’altération du la introduit dans le calme du rêve un élément de léger trouble, qui va s’implanter, avec Y adagio espressivo, annoncé par la deuxième moitié de la huitième mesure, qui module à la tonalité de la quinte. Il y a glissement (et non sursaut) d’un état de la sensibilité à l’autre ; et ce flottement de l’émotion s’accentuera, au cours de Yadagio — si peu adagio en fait, car la pensée dont la direction semble (à tort) échapper à l’esprit, s’évade en une course éperdue en triples et quadruples croches, par groupes irréguliers de cinq, de six, de quatre, de deux, de trois, du haut en bas et du bas en haut du clavier ; et constamment, l’éclairage se modifie. C’est, dans la demi-conscience du rêveur, comme une pause, pendant laquelle l’esprit vagabonde, à travers une succession rapide de lumières et d’ombres. (La pédale y joue un rôle important, avec la mobilité des indications dynamiques : elles donnent au tissu harmonique une vie souple et chaude). La « folle du logis », la vagabonde, retourne au lit de la rêverie mesurée du début (fin de la mesure 15). Mais, comme si l’esprit voulait reprendre plus impérieux le contrôle de la pensée, ici s’accuse une montée un peu agressive et non sans tourments de l’énergie, qui correspond aux exigences techniques de la Durchführung du morceau. Ainsi qu’il en advient dans les meilleurs moments de l’art classique, le mouvement naturel de l’âme s’associe avec celui préétabli de la forme acceptée. Heinrich Schenker fait remarquer qu’au cours de ce double travail de développement et de combat, deux 11. Sans comptes la demi-mesure d’attaque.