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Page:Rolland - Beethoven, 3.djvu/608

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BEETHOVEN

Le plus curieux est la question d’une Messe pour Napoléon — pour Napoléon vivant, à Sainte-Hélène L Le général Bertrand l’a commandée à Eibler. Napoléon veut une chapelle ; et une place de Kapellmeister à Sainte-Hélène est offerte. Kanne se met sur les rangs ; il demande 6.000 thalers par an. Peters engage Beethoven à composer un hymne pour l’Empereur. Mais Beethoven s’y refuse, semble-t-il, non sans humeur.

Ceci nous fournit une transition inattendue entre deux ordres de pensée, qui paraissent fort éloignés l’un de l’autre, et qui pourtant font étroit ménage ensemble, chez Beethoven : — entre la musique et la politique. Aucun sujet de conversation n’occupe dans les Cahiers une place aussi importante et aussi intéressante que la politique. On est surpris de l’extrême audace des propos échangés dans le petit cercle de Beethoven. Le grand musicien sourd, qu’on eût imaginé muré au monde, enfermé dans son art, suit, d’un regard aigu et souvent prophétique, la fermentation sociale, les frémissements populaires, les transformations cachées, l’avenir révolutionnaire qui se prépare en Europe. 1819-1820 étaient des années critiques pour les libertés allemandes. 11. Ibid., p. 316-317 (février 1820).