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LES DERNIERS QUATUORS

mineur, marqué sur l’esquisse : « Bcklemmt » (oppressé)[1] ; il a exactement le même nombre de mesures que dans le texte définitif ; mais le dessin de la plainte mélodique est moins agité, et retombe, à la fin, sans la montée passionnée du texte conservé :

[partition à transcrire]

Beethoven a rectifié le titre : « Cavatina » en « Arietta quasi Cavatina ».

Si l’on compare à toutes ces ébauches l’œuvre définitive, on admire le resserrement de la pensée. Peu d’adagios de Confessions, chez Beethoven, ont été aussi volontairement comprimés, réduits à l’essentiel, émondés de leur surabondance émotionnelle. C’est pourquoi il parlera moins directement au grand public qu’à une élite… Il enferme en une page l’essence concentrée de longs jours d’effusions et de larmes. Le caractère nostalgique en est marqué par les répétitions fréquentes des cadences finales en une mesure, comme des échos (mes. 9, 16, 22, 31 et la deuxième avant la fin). Il s’en dégage une impression profonde de solitude, avec le rêve du passé perdu, dont le regret aimant et pieux oppresse l’âme, qui s’en rend maître religieusement et le pacifie, — et se pacifie — en soupirant. Il n’est pas de plus noble révélation que cette Cavatine[2], de la solitude de Beethoven et de la

  1. Cette indication, qui doit être inscrite sur le texte publié, a été malheureusement supprimée dans bien des éditions.
  2. Ce nom de Cavatina surprend d’abord ; avec nos souvenirs de