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Page:Rolland - Beethoven, 5.djvu/66

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BEETHOVEN

Le Presto nous arrache au deuil, pour nous jeter dans le tourbillon de batailles de la Symphonie en ut mineur. Mais le trio vertigineux («  più presto quasi prestissimo »), qui, comme la guêpe, tourne et retourne dans son cercle, obstinément répété, projette au milieu un éclatant rayon d’ut majeur ; et sur la bataille plane pesamment un puissant cantus firmus — comme un choral.

L’’allegretto final con variazioni, qui s’y enchaîne, ramène la paix bénie des champs, l’oubli, le repos, le rire et le rêve de langueur alternés, — « le sommeil de Renaud ». — La plus ensorcelante des variations est la sixième, la dernière, où s’épanouit un jardin d’Armide, plein de délices d’harmonies où l’âme chavire voluptueusement. Rarement, la palette de Beethoven a été plus « moderne » qu’en ces quelques touches de lumière diaprée, qui module sans se fixer, en un hypnotisant balancement.



La deuxième circonstance qui ramena la pensée de Beethoven au confessionnal du quatuor — un confessionnal de la passion, où on n’accuse pas seulement soi, mais la destinée, — lui fut plus douloureuse encore peut-être, et sûrement plus personnelle. Ce fut, en mai 1810, l’écroulement de son rêve de mariage avec Thérèse Malfatti. D’aucune de ses tragédies du cœur nous ne sommes aussi précisément informés que de celle-ci. Il était si follement assuré du consentement de l’aimée et de la famille qu’il avait fait venir de Bonn, par Wegeler, tous les papiers