Page:Rolland - Colas Breugnon.djvu/149

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la gueule de ce loup ! Je ne veux point d’un mari détrenché, disloqué. Je te veux tout entier… » Ah ! landeridera, lanlaire, lanturlu, tandis que je faisais tous ces lantiponnages, ce maître hurluberlu lampait au cabaret, ne savait déjà plus pourquoi s’était battu, et bras dessus bras dessous, avec le loup s’enfuit (ah ! le lâche ! le lâche ! ), fuit devant la brebis !… Breugnon, que je t’ai haï !… Bonhomme, quand je te vois, quand je nous vois aujourd’hui, cela me paraît comique. Mais alors, mon ami, je t’aurais avec délices écorché, grillé vif ; et, ne pouvant te punir, c’est moi, puisque je t’aimais, c’est moi que je punis. L’homme au moulin s’offrit. Dans ma rage, je le pris. Si ce n’eût été cet âne, j’en aurais pris un autre. Faute d’un Martin Bâton, l’abbaye n’eût point chômé. Ah ! comme je me vengeai ! Je ne pensais qu’à toi, tandis qu’il…

— Je t’entends !

—…tandis qu’il me vengeait. Je pensais : « Qu’il revienne à présent ! Le chef te démange-t-il, Breugnon, en as-tu ton compte ? Qu’il revienne ! Qu’il revienne ! » … Hélas ! tu es revenu, plus tôt que je n’aurais voulu… Tu sais la suite. À mon sot je me trouvai attachée, pour la vie. Et l’âne (est-ce lui ou moi ? ) est resté au moulin.

Elle se tut. Je dis :

— Au moins, y es-tu bien ?

Elle haussa les épaules et dit :

— Aussi bien que l’autre.

— Diable ! fis-je, cette maison doit être un paradis ?