Page:Rolland - Colas Breugnon.djvu/279

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Amis ! Il n’est de premier parmi nous. Embrassons-nous ! Voici celui qui nous met tous d’accord, notre maître, le seul (après le duc, bien entendu). Il est venu. Qu’on le salue ! Gloire à Bacchus !

Et prenant par les fesses mon Gambi, je le hisse sur le char où il glisse et culbute dans un fût de raisin écrasé. Puis j’empoigne les brides, et dans le Pré-le-Comte nous entrons les premiers ; Bacchus, trempant sa base dans le jus du tonneau, la tête couronnée de pampres, gigotait des jambes et riait. Bras dessus, bras dessous, tous les saints et les saintes, derrière le derrière de Bacchus triomphant, le suivaient en dansant. Il faisait bon sur l’herbe ! On y balla, mangea, joua, campa, tout le jour, autour de ce bon duc… Et, le lendemain matin, le pré était pareil à un parc à cochons. Plus un fil de gazon. Nos semelles étaient inscrites dans le sol tendre, et témoignaient du zèle avec lequel la ville avait fêté le seigneur duc. Je pense qu’il en fut bien content. Et parbleu, nous le fûmes aussi !… À vrai dire, le lendemain, le procureur crut opportun, quand il revint, de s’indigner, de protester, de menacer. Il n’en fit rien, il s’en garda. Oui bien, il ouvrit une enquête ; mais il eut soin de ne la fermer point : il est plus sain de laisser les portes ouvertes. Nul ne tenait à rien trouver.

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C’est ainsi que nous montrâmes que les Clamecycois