qui viennent sur leur char rendre visite à Rome.
Marchent en tête la musique et les hallebardiers, qui fendent la foule avec leurs nez. Nez en trompes, nez en lances, nez en cors de chasse, nez sarbacanes, nez hérissés d’épines, ainsi que des châtaignes, ou sur le bout desquels des oiseaux sont plantés. Ils bousculent les badauds, ils farfouillent les cottes des filles qui glapissent. Mais tout s’écarte et fuit devant le roi des nez, qui fond comme un bélier, et telle une bombarde, roule sur un affût à roulettes son nez.
Suit le char de Carême, empereur des mangeurs de merluches. Des figures blêmes, vertes, décharnées, enfroquées, renfrognées, grelottantes sous des capuchons, ou coiffées en têtes de poissons. Que de poissons ! Celui-ci tient en chaque poing une perche ou un carpillon ; l’autre brandit, à une fourche, une brochette de goujons ; un troisième nous exhibe pour chef une tête de brochet, du bec duquel sort un gardon, et qui s’accouche avec une scie, s’ouvrant le ventre plein de poissons. J’en ai une indigestion… D’autres, la gueule ouverte, y enfonçant leurs doigts afin de l’élargir, s’étouffent en poussant dans leur gosier (À bouère ! ) des œufs qui ne veulent point passer. À gauche, à droite, du haut du char, masques de chevêches, robes de frocards, des pêcheurs à la ligne pêchent, au bout d’un fil, les galopins qui sautent comme des cabris, le bec en l’air pour attraper et croquer, croque, croque au vol, les dragées ou les crottes dans le sucre roulées. Et par-derrière, un diable danse,