Page:Rolland - Colas Breugnon.djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


— Eh bien, Colas Breugnon, tu lui en apprends de belles ! gronde le curé Chamaille.

— Je ne lui dis pas que c’est beau, je lui dis que c’est ce que chacun fait, toi, curé, tout le premier. Tu peux rouler des yeux. Lorsque tu as affaire à une de tes dévotes qui voient tout, qui savent tout, qui mettent leur nez partout, qui ont la bouche ainsi qu’un sac plein de malices, ose prétendre un peu que, pour les faire taire, tu ne leur bourrerais pas le bec avec des crêpes !

— Ah ! Dieu, si cela suffisait ! s’exclame le curé.

— J’ai calomnié Margot, elle vaut mieux qu’une femme. Au moins sa langue est bonne parfois à quelque chose.

— Et à quoi donc, grand-père ?

— Quand le loup vient, elle crie…

Or, voilà qu’à ces mots, l’agasse se met à crier. Elle jure, elle sacre, elle bat des ailes, elle vole, elle couvre d’invectives je ne sais qui, je ne sais quoi, qui est dans la vallée d’Armes. À la lisière du bois, ses compères emplumés, le geai Charlot et Colas le corbeau, lui répondent sur le même ton aigre et irrité. Les gens rient, les gens crient : « Au loup ! » Personne n’y croit. On n’en va pas moins voir (croire est bon, voir vaut mieux)… Et que voit-on ?… Nom d’un petit bonhomme ! Une bande de gens armés, qui montent la côte au trot. Nous les reconnaissons. Ce sont ces sacripants, les troupes de Vézelay, qui, sachant notre ville démunie de sa garde, s’imaginaient trouver la pie (mais non celle-ci) au nid !…