Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 1.djvu/50

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Grand-père le prenait souvent avec lui, dans ses promenades du soir. Le petit trottinait à ses côtés, en lui donnant la main. Ils allaient par les chemins, au travers des champs labourés, qui sentaient bon et fort. Les grillons crépitaient. Des corneilles énormes, posées de profil en travers de la route, les regardaient venir de loin et s’envolaient lourdement à leur approche.

Grand-père toussotait. Christophe savait bien ce que cela voulait dire. Le vieux brûlait d’envie de raconter une histoire ; mais il voulait que l’enfant parût la lui demander. Christophe n’y manquait pas. Ils s’entendaient ensemble. Le vieux avait une immense affection pour son petit-fils ; et ce lui était une grande joie de trouver en lui un public complaisant. Il aimait à conter des épisodes de sa vie, ou l’histoire des grands hommes antiques et modernes. Sa voix devenait alors emphatique et émue ; elle tremblait d’une joie enfantine, qu’il tâchait de refouler. On sentait qu’il s’écoutait avec

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