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Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 10.djvu/77

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LA NOUVELLE JOURNÉE

Ils se promenaient ensemble. Quand elle consentait à sortir de sa torpeur d’Orientale, où elle s’absorbait pendant des heures, elle devenait tout autre ; elle aimait à marcher : grande, les jambes longues, la taille robuste et flexible, elle avait la silhouette d’une Diane de Primatice. — Le plus souvent, ils allaient à une de ces villas, épaves du naufrage où la splendide Rome du settecento a sombré sous les flots de la barbarie piémontaise. Ils avaient une prédilection pour la villa Mattei, ce promontoire de la Rome antique, au pied duquel viennent mourir les dernières vagues de la Campagne déserte. Ils suivaient l’allée de chênes, dont la voûte profonde encadre la chaîne bleue, la suave chaîne Albaine, qui s’enfle doucement comme un cœur qui palpite. Rangées le long du chemin, des tombes d’époux romains montraient, à travers le feuillage, leurs faces mélancoliques et la fidèle étreinte de leurs mains. Ils s’asseyaient au bout de l’allée, sous un berceau de roses, adossés à un sarcophage blanc. Devant eux, le désert. Paix profonde. Le chuchotement d’une fontaine aux gouttes lentes, qui semblait expirer de langueur. Ils causaient à mi-voix. Le regard de Grazia s’appuyait avec confiance sur celui de l’ami. Christophe disait sa vie, ses luttes,