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Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 2.djvu/160

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Jean-Christophe

avec une fidélité amusante le fouillis baroque de ce petit cerveau féminin.

Sur la table, de minuscules statuettes de chats musiciens, — tout un orchestre, — l’un jouant du violon, l’autre du violoncelle, une petite glace de poche, des objets de toilette, et des objets pour écrire, parfaitement rangés. Sur l’étagère, des bustes microscopiques de musiciens : Beethoven renfrogné, Wagner avec son béret, — et l’Apollon du Belvédère. Sur la cheminée, à côté d’une grenouille fumant une pipe de roseau, un éventail en papier, sur lequel était peint le théâtre de Bayreuth. Dans la bibliothèque à deux rayons, quelques livres : Lübke, Mommsen, Schiller, Sans famille, Jules Verne, Montaigne. Aux murs, de grandes photographies de la Vierge Sixtine et de tableaux de Herkomer : elles étaient bordées de rubans bleus et verts. Il y avait aussi une vue d’hôtel suisse, dans un cadre de chardons argentés ; et surtout, une profusion, partout, dans tous les coins de la chambre, de photographies d’officiers, de ténors, de chefs d’orchestre, d’amies, — toutes avec des dédicaces, presque toutes avec des vers, — ou du moins, avec ce qu’on est convenu, en Allemagne, d’appeler des vers. Au milieu de la pièce, sur un socle de marbre, trônait le buste de Brahms barbu ; et, au-dessus du piano, se balançaient au bout d’un

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