Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 2.djvu/17

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Quelques années ont passé. Christophe va avoir onze ans. Il continue son éducation musicale. Il apprend l’harmonie avec Florian Holzer, l’organiste de Saint-Martin, un ami de grand-père, qui est un homme très savant, et qui lui enseigne que les accords, les successions d’accords qu’il aime le mieux, des harmonies qui lui caressent doucement l’oreille et le cœur, et qu’il ne peut entendre sans qu’un petit frisson lui coure le long de l’échine, sont mauvais et défendus. Quand il demande pourquoi, il n’y a d’autre réponse, sinon que c’est ainsi : la règle les défend. Comme il est naturellement indiscipliné, il ne les en aime que mieux. Sa joie est d’en trouver des exemples chez les grands musiciens qu’on admire, et de les apporter à grand-père, ou à son maître. À cela, grand-père répond que, chez les grands musiciens, c’est admirable, et que Beethoven ou Bach pouvaient tout se permettre. Le maître, moins conciliant, se fâche, et dit aigrement que ce n’est pas ce qu’ils ont fait de mieux.

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