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la révolte

il resta affolé. Il voulut courir au journal ; mais sa mère l’en empêcha, redoutant, non sans raison, sa violence. Il la redoutait lui-même ; il sentait que s’il allait là, il ferait quelque sottise ; et il resta, — pour en faire une autre. Il adressa au journaliste une lettre indignée, où il lui reprochait sa conduite en termes blessants, désavouait l’article, et rompait avec le parti. Le désaveu ne parut pas. Christophe récrivit au journal, le sommant de publier sa lettre. On lui envoya copie de sa première lettre, écrite le soir de l’entretien, et qui en était la confirmation : on lui demandait s’il fallait la publier aussi. Il se sentit dans leurs mains. Là-dessus, il eut le malheur de rencontrer dans la rue l’interviewer indiscret ; il ne put s’empêcher de lui dire le mépris qu’il avait pour lui. Le lendemain, le journal, sans la moindre pudeur, publia un entrefilet insultant, où l’on parlait de ces domestiques de cour, qui, même quand on les a flanqués à la porte, restent toujours des domestiques et ne sont plus capables d’être libres. Quelques allusions à l’événement récent ne permettaient point de douter qu’il ne s’agît de Christophe.