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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

sans armés de faux, faisant bouillir des chaudières pour défendre les églises, que des libres penseurs défonçaient, au nom de la liberté, des Rédempteurs populaires, qui montaient dans les arbres pour parler aux provinces du Vin, soulevées contre les provinces de l’Alcool. Par-ci, par-là, ces millions d’hommes qui se montraient le poing, tout rouges d’avoir crié, finissaient par se cogner tout de bon. La République flattait le peuple ; et puis, elle le faisait sabrer. Le peuple, de son côté, cassait la tête à quelques enfants du peuple, — officiers et soldats. — Ainsi, chacun prouvait aux autres l’excellence de sa cause et de ses poings. Quand on regardait cela de loin, au travers des journaux, on se croyait revenu de plusieurs siècles en arrière. Christophe découvrait que la France, — cette France sceptique, — était un peuple fanatique. Mais il lui était impossible de savoir en quel sens. Pour ou contre la religion ? Pour ou contre la raison ? Pour ou contre la patrie ? — Ils l’étaient dans tous les sens. Ils avaient l’air de l’être, pour le plaisir de l’être.