Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 7.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

8
JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

— Ouf ! on ne respire pas. Vous pouvez vivre ici ?

— On s’y fait.

— Je ne m’y ferais jamais.

Christophe ouvrait son gilet, et respirait avec force.

Olivier alla ouvrir la fenêtre, tout à fait.

— Vous devez toujours être mal à l’aise dans une ville, monsieur Krafft. Moi, je ne cours pas le risque de souffrir de ma force. Je respire si peu que je trouve à vivre partout. Pourtant, il y a des nuits d’été qui sont pénibles, même pour moi. Je les vois venir avec crainte. Alors, je reste assis sur mon lit, et il me semble que je vais étouffer.

Christophe regarda la pile d’oreillers sur le lit, la figure fatiguée d’Olivier ; et il le vit se débattant dans les ténèbres.

— Partez d’ici, dit-il. Pourquoi y restez-vous ? Olivier haussa les épaules, et répondit, d’un ton indifférent :

— Oh ! ici ou ailleurs !…

Des souliers lourds marchaient au-dessus du plafond. À l’étage au-dessous, des voix aigres se disputaient. Et, de minute en minute, les murs étaient ébranlés par le grondement de l’omnibus dans la rue.

— Et cette maison ! continua Christophe. Cette maison qui transpire la saleté, la chaleur malpropre, l’ignoble misère, comment pouvez-